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Kakina

Kakina

Je suis débarquée en Abitibi-Témiscamingue en janvier 2016 avec dans mon baluchon, une connaissance que je qualifierais de très nulle au sujet des autochtones. Pour moi, il n’y avait pas de différences entre les nations, je les mettais pas mal toutes dans le même panier. Comme ben du monde, je trouvais que ça avait l’air de brasser pas mal à Lac Simon. Drogue, violence, alcoolisme, tout ça. Je ne m’étais jusqu’alors jamais intéressée à ceux avec qui au Québec, comme un peu partout dans les différentes provinces canadiennes, on partage le territoire mais qu’on ne côtoie pas, à moins d’habiter proche d’une réserve. Le peuple invisible que Richard Desjardins disait.

Tout ça a changé drastiquement pour moi quelque part à l’automne 2016. Dans le cadre de ma job au FME, j’ai assisté à une rencontre entre artistes autochtones et allochtones dans le but d’apprendre à se connaître dans un premier temps puis, dans un second, de réfléchir et de mettre sur pied un projet qui allait amener les deux peuples à travailler ensemble. Je suis arrivée là sans trop savoir à quoi m’attendre. Je me souviens que j’étais un peu nerveuse. J’avais étrangement peur de dire des trucs déplacés, d’offenser l’un ou l’autre des autochones à qui, en réalité, je ne savais pas quoi dire. Le comportement maladroit d’une jeune femme qui réalise ne rien connaitre sur l’autre, sauf peut-être les généralités abrutissantes qu’on nous poussent dans les médias. Au terme de cette journée révélatrice, j’ai quitté les lieux dans un drôle d’état. J’étais à la fois reconnaissante d’avoir entendu les témoignages authentiques des artistes autochtones quant à leurs valeurs, leur histoire et leur culture, mais j’étais surtout troublée de réaliser que je ne m’étais jamais attardé à leur existence, comme la grosse majorité de la population québécoise. J’avais honte.

Dans les jours et les mois qui ont suivis, j’ai voulu me rattraper. J’ai voulu m’informer, m’éduquer quant à l’histoire des Premières Nations, la nôtre par le fait même. J’ai lu plusieurs livres, visionné des documentaires. Les écrits de Serge Bouchard m’ont particulièrement nourri. Ils m’ont permis de redécouvrir notre histoire sous un jour différent. De comprendre qu’à une époque, blancs et Indiens cohabitaient dans une certaine harmonie et que sans le savoir des Premières Nations, aucun colon n’aurait réussi à survivre ici. J’ai constaté aussi que c’est facile de manipuler l’histoire, surtout quand elle est observée à travers les jumelles d’humains qui, comme tout le monde, ont une vision, une expérience, une culture et des codes particuliers. On oublie souvent qu’il y a toujours deux côtés à une médaille.

Je suis désormais habitée par une vive soif d’approfondir mes connaissances au sujet des Premières Nation. J’ai décidé d’entamer à l’hiver 2018 un microprogramme en études autochtones. Je remarque au fil des rencontres et des apprentissages que les sensibilités sont multiples, que le chemin vers une éventuelle réconciliation est loin d’être tracé. Toutefois, au-delà de la théorie, des différences de parcours, culturelles ou sociales, nous sommes tous humains. C’est ce que j’essaie de me répéter quand tout se brouille dans ma tête.

Mon passage comme employée au FME m’a permis de travailler sur un projet unique qui unissait la gang du festival et celle du Pow Wow de Pikogan. Au cours des étapes qui nous ont mené à présenter le fruit de notre démarche dans nos événements respectifs, nous nous sommes donné du temps pour se découvrir, s’apprivoiser, échanger. Cette rencontre avec l’autre amorcée il y a maintenant plus d’un an se développe tranquillement, au gré des moments passés ensemble, entre humains qui partagent un même territoire, certes, mais surtout plusieurs valeurs communes. Je fais partie des gens qui sont choyés de participer à cette démarche qui s’avère extrêmement nourrissante. Sans savoir ce que l’avenir me réserve, je sais que j’ai envie de faire partie de ceux qui auront travaillé à bâtir des ponts plutôt qu’à regarder le fossé se creuser.

Continuons l’histoire, tous ensemble.

Kakina.

Josée Hardy-Paré